Michael Jackson et le réalisateur Joe Pytka
Il y a quelques jours, la page facebook MJStreet nous partageait le site de Joe Pytka.
Ce réalisateur américain a plusieurs collaborations à son actif avec Michael Jackson au cours des années Bad et Dangerous. On lui doit notamment les short films The Way You Make Me Feel, Dirty Diana, Heal The World, les publicités Pepsi The Chase et I’ll Be There et The Wave, la publicité pour la marque de téléviseurs japonais Kirara Basso
Réputé pour son fort caractère et son franc-parler, Joe Pytka est l’un des meilleurs dans son domaine et il est parmi les rares professionnels à avoir travaillé aussi souvent avec Michael Jackson.
Sur son site pytka.com il raconte ses expériences vécues dans le monde de la réalisation. Ci-après, ont été traduits les moments relatifs à Michael Jackson.
[NB : certains passages utilisent des mots ou expressions relativement vulgaires en anglais, je les ai traduits d’une manière plus « soft »]
Travailler avec Michael Jackson
La contribution de Michael à la musique est incommensurable. Il égale Joe Louis, Mohamed Ali, Rosa Parks, Malcolm X et Martin Luther King pour sa contribution à l’égalité raciale. Avant Michael, les musiciens noirs étaient exploités et relégués aux confins de la culture populaire. Les Beatles, les Rolling Stones, Elvis et Pat Boone se sont inspirés de la culture noire et l’ont exploitée à l’infini. Michael a mis fin à tout cela. Après Michael, les artistes noirs ont été considérés comme égaux, pas relégués au rayon du R&B.
Michael était un génie. Il avait une vision et une perspicacité inégalées. Il a également respecté les talents des autres. Après avoir travaillé avec lui sur des publicités Pepsi, j’ai eu le privilège de tourner trois vidéos pour lui. La première, The Way You Make Me Feel, était devenu numéro un, tout comme la deuxième vidéo, Dirty Diana. C’était le but. Faire de ces chansons des numéros un.
The Way You Make Me Feel
Quand j’ai entendu la démo de The Way You Make Me Feel pour la première fois, j’ai trouvé que la chanson était lisse. (…)
J’ai demandé à Michael où il pensait que cela devait se passer et il m’a répondu Skid Row. J’ai réuni des membres de gangs, les Bloods et les Crips, et j’avais tourné des documentaires sur la façon dont ils traînent les rue et traitent leurs femmes. La vidéo représente plus ou moins cette réalité. J’ai montré le truc à Michael, m’excusant pour le langage, mais il a adoré et a demandé si la vidéo pouvait avoir ce même « look véridique ». C’était sa façon instinctive de dire « cinéma vérité ».
Michael voulait une longue préquelle à la vidéo, alors j’ai demandé au dramaturge August Wilson de m’aider mais il a refusé catégoriquement. Martin Scorsese avait bien demandé à Richard Price d’écrire le script pour Bad ! J’ai décidé d’écrire le truc moi-même. La plupart des gens n’ont pas vu la version longue (ci-dessous). Epic a estimé que la longue version ne passerait pas pour les médias et nous avons donc coupé et fait une version beaucoup plus courte. Il ne faut pas oublier que le but des vidéos était de vendre des disques.
Les critiques et le public ont complètement oublié le fait qu’il y a une autre chanson sur la vidéo, Hot de Roy Ayers. Elle a été utilisée pour l’introduction. J’avais voulu utiliser une musique de Miles Davis mais le manager de Michael, Frank DiLeo, m’a dit de ne pas le faire parce qu’il était très difficile de traiter avec Miles.
J’avais expérimenté avec le réalisateur Larry Bridges des techniques cinématographiques, en particulier le peu d’informations dont un plan a besoin pour faire passer un message. La structure de la vidéo était une forme de sonate libre, le mouvement final étant plutôt poétique. Michael avait dit qu’il ne voulait pas danser de manière formelle, mais au cours des jours de préparation qui ont précédé, j’ai entendu la musique dans une pièce éloignée de l’entrepôt que nous utilisions comme plateau de tournage. J’ai passé la tête et Michael et Vince Paterson étaient là, en train de répéter une chorégraphie. Je les ai regardés un moment et ils m’ont alors dit que Michael avait finalement décidé d’intégrer un morceau de danse. Mon problème était que je n’avais pas de place pour le mettre. Je suis retourné sur le plateau et j’ai demandé à Geoffrey Kirkland, le chef décorateur, de construire un endroit pour une bouche d’incendie. J’ai ensuite donné des coups de marteau dans une voiture et nous avions notre décor. La partie chorégraphiée était provocante et merveilleuse, pleine du génie de Michael et de Vince. (Joe Pytka revient plus en détail sur cet épisode un peu plus bas).
Michael m’a dit que la cravate qu’il utilise comme ceinture dans la vidéo était une idée qu’il a eue de son ami Fred Astaire.
Plus tard, je dînais avec la designer française Andrée Putman au Coyote Cafe de Santa Fe. Le maître d’hôtel est venu me dire que Michael Jackson était au téléphone. C’était à peu près la seule interruption qu’Andrée tolérait. Michael voulait discuter de quelques changements mineurs dans la vidéo de montage de The Way You Make Me Feel. Il était en tournée au Japon à l’époque. Je suis resté au téléphone pendant un bon moment pendant qu’il regardait toute la vidéo. Je n’ai jamais su comment il m’avait localisé puisque personne ne savait où j’étais.
Dirty Diana
L’objectif ici était de donner à Michael un look de hard rocker. C’est de là qu’est venue l’idée de « concert ». Nous avons construit un décor et nous avons fait venir un public live le premier jour. Mon ami Conrad Hall était entre deux films et il a gentiment accepté de faire partie de l’équipe de tournage. Je ne savais pas vraiment ce que Michael allait faire sur scène, je devais être prêt à tout. C’est pourquoi la présence de Conrad était si importante. Conrad était un des deux plus grands cinéastes de tous les temps et je savais que j’aurais une grande couverture sans avoir à ‘diriger’ la caméra. Il m’a donné la liberté de shooter avec ma caméra et de prendre des risques. La vidéo a été un succès. Le costume de Steve Stevens a coûté vingt mille dollars.
Nous n’avons pas filmé beaucoup le deuxième jour parce que Michael a glissé sur ses genoux sans coussinet le premier jour. J’avais prévu d’engloutir le décor avec de la pluie et des éclairs et de le détruire littéralement dans un déluge, mais j’ai dû me contenter d’une vidéo de concert. La performance de Michael ressemblait bien assez à une tempête. Mick Jagger, à côté, avait l’air bidon. Des rumeurs ont dit que la fille était Cheryl Crow. Ce n’est pas vrai. C’était juste un modèle avec des jambes formidables. [l’actrice dont les jambes apparaissent dans le short film s’appelle Lisa Dean]
Heal The World
J’ai dit à Michael qu’il ne pouvait pas être dans la vidéo. Il a accepté.
Je voulais vraiment faire le tour du monde et tout filmer mais le coût, la logistique et les délais étaient trop monstrueux. Le message était complètement altruiste et, je pense, puissant.
J’ai dû rencontrer Michael en Roumanie pour discuter du concept. Il y avait une énorme présence militaire à cause des bouleversements politiques de l’époque. J’ai été conduit au palais présidentiel, où Michael résidait, et j’ai dû passer par plus de points de contrôle que James Bond. En raison du concert de Michael sur place [le 1er octobre 1992], les élections avaient été retardées. Je n’ai jamais été aussi heureux de partir d’un endroit que de la Roumanie.
J’ai été proche de Michael pendant de nombreuses années. Il appelait de temps en temps pour sortir, généralement au milieu de la nuit dans un studio pendant qu’il mixait un album. Le meilleur moment a été au Beverly Hills Hotel [à Los Angeles], où il se « cachait » avec son jeune fils. On évoquait simplement quelques unes des choses que nous avions faites. Son fils avait environ un an, il était adorable et fasciné par ma taille et mes cheveux. Michael discutait d’une vidéo qu’il faisait avec Vince Paterson en tant que réalisateur [il s’agirait ici du clip Blood On The Dance Floor, mais les dates ne correspondent pas, Michael étant en train de tourner le clip au moment de la naissance de son fils]. Je lui ai suggéré Conrad Hall pour la filmer car Conrad avait fait un travail formidable sur Dirty Diana.
C’est la dernière fois que je l’ai vu. L’enfer s’est déchaîné et il est devenu solitaire. Triste.
La publicité Pepsi I’ll Be There
Michael Jackson a réenregistré I’ll Be There pour une publicité Pepsi où il chantait avec lui-même quand il était jeune. Nous recherchions un garçon qui pouvait l’imiter et nous ne trouvions pas. Michael a suggéré un garçon d’Australie, Wade Robson. Wade était blanc mais cela n’avait pas d’importance puisque nous allions de toute façon superposer la tête de Michael sur celle de Wade et le reste ne devait être qu’une silhouette. Les mouvements étaient la seule chose importante.
Le travail numérique en était encore à ses balbutiements, nous étions donc limités dans ce que nous pouvions faire. Nous avons tourné le spot et c’était convaincant malgré les compromis que nous avons dû faire. La presse a été une autre affaire.
J’ai reçu un appel me demandant pourquoi nous avons pris un garçon blanc. J’ai répondu qu’il était le meilleur pour le rôle, et que cela n’avait pas d’importance car nous utilisions de vieilles images de Michel pour ajuster. Bien sûr, la presse ne se souciait d’aucune vérité et ils ont démonté Michael.
Des années plus tard, Wade Robson chorégraphiait Britney Spears pour une publicité Pepsi que je faisais. Nous nous sommes souvenus de la grandeur et des influences de Michael et quelle merveilleuse coïncidence c’est de se voir après toutes ces années.
Vous imaginez, Wade a poursuivi la succession de Michael Jackson après son décès. Le juge a rejeté la poursuite pour diverses raisons, notamment le fait que Robson avait témoigné sous serment dans une affaire antérieure que rien ne s’était jamais produit.
Triste. L’argent fait tourner le monde.
Merci à Féfé @fefeinla pour les photos des pass de la pub Pepsis
Tatiana Thumbzen
Je voulais qu’August Wilson écrive « l’histoire » de la version longue de la vidéo The Way You Make Me Feel. Martin Scorsese avait pu avoir Richard Price (scénariste de The Color of Money) pour écrire la préquelle de Bad et j’admirais le travail d’August Wilson depuis que j’avais vu Fences à Broadway. De plus, Wilson était originaire de Pittsburgh et je pensais qu’il considérerait ma demande puisque nous étions tous les deux de cette ville.
Pas du tout.
La chanson ne me plaisait pas tant que ça. Je travaillais sur Man In The Mirror et Frank m’a dit de laisser tomber, affirmant qu’une vidéo pour The Way You Make Me Feel était plus importante. J’avais du mal à visualiser le scénario jusqu’à ce que Michael dise qu’il voulait que cela se passe à Skid Row et que Quincy me fasse savoir que le but était que Michael réussisse à conclure avec une nana.
Je n’entrerai pas dans les détails de la façon dont l’idée est née, mais LA fille est devenue importante. Je n’avais pas encore rencontré Vince Paterson et je ne me souviens pas de lui lors des auditions, mais je suis arrivée avec trois filles que j’avais sélectionnées. Je les ai montrées à Frank.
Première fille.
« Pas bien. » « Pourquoi? » » Prince se la tape. »
Deuxième fille.
« Pas bien. Quincy se la tape. «
Troisième fille.
« Pas bien. Je me la tape. «
Retour à la case départ, avec une marche de manœuvre limitée.
J’ai examiné à nouveau les bandes et j’ai trouvé trois autres filles, mais pas aussi bien que les précédentes. Frank a approuvé et nous avons organisé une session avec Michael. Michael a aimé Tatiana. Il a répété quelques mouvements avec elle sur la chanson. Elle flirtait beaucoup. J’ai essayé, essayé, j’essayé de voir ce qu’il voyait en elle. L’androgynie?
J’ai rencontré Paul Gobel (un génie du maquillage et des cheveux) et Wendy Keller (un génie de la garde-robe). Il s’est avéré que Tatania avait un corps génial et Wendy avait une robe noire qui lui allait à merveilles. Paul s’est occupé de ses cheveux et du maquillage et l’a transformée.
Le premier jour de tournage, j’ai trouvé Tatiana dans un coin de l’immense décor, essayant de refaire son maquillage. Pour une raison quelconque, elle s’était mis un horrible rouge à lèvres rouge. Je suis allée la voir : « Il y a trois autres filles aussi bonnes sinon meilleures que toi. Tu n’es pas encore confirmée. Ne joue pas avec ton maquillage! «
Elle a compris le message et Michael et Vince l’ont entraînée pendant les jours de tournage. Elle attirait l’attention et nous recevions des appels de personnes qui cherchaient la même robe que la sienne. Tatiana a reçu un appel d’une des émissions populaires de fin de soirée. Je ne me souviens pas laquelle c’était. Peut-être le Tonight Show de Johnny Carson, je ne sais plus. Je l’ai appelé pour voir si elle voulait de l’aide pour le maquillage et sa coiffure afin qu’elle ressemble à la fille dans la vidéo. ‘Non’, elle m’a répondu. J’ai regardé l’émission et elle était méconnaissable.
Cela ne lui a pas réussi, mais Michael l’a emmenée en tournée. Je ne sais pas pourquoi puisqu’elle n’avait aucun talent pour être sur scène. Le temps passe et pendant que la tournée de Michael faisait un break, on s’est retrouvé dans un studio. Il s’est plaint qu’elle était entreprenante.
« Eh bien, tu n’as qu’à te la faire alors, dans la limousine, après un concert. Ca pourrait être amusant. »
Je plaisantais bien sûr parce que ce genre de chose faisait peur à Michael. Il détestait la vulgarité. Frank m’a suivi dans le couloir.
« Qu’est-ce que tu fous, bordel? »
« Quoi? »
« Ne mets pas ce genre d’idées dans la tête de Michael. »
« Et pourquoi pas? »
« Parce que j’ai assez de problèmes comme ça. »
« En quoi le fait qu’il se la fasse est un problème? »
« Parce que je me la fais. »
Tu veux des plus de problèmes de casting?
Tatiana était sa propre ennemie. Elle a parlé dans un livre du fait qu’elle s’était faite virée pour avoir embrassé spontanément (?) Michael sur scène. J’avais évité un baiser dans la vidéo (et j’en ai reçu quelques critiques). Je pensais que ce serait ringard dans de telles circonstances. Michael lui accordait une chance en la faisant participer au concert. Elle ne savait ni chanter et ni danser. Elle a été remplacée par des danseurs par la suite (et le spectacle a été amélioré).
Je ne savais pas si Frank plaisantait ou pas, à propos de lui, de Prince, de Quincy. Je sais juste que Tatiana était sa propre ennemie.
Je ne me souviens pas qui était mon premier choix …
La rencontre avec Vincent Paterson
J’ai rencontré Vincent Paterson par l’intermédiaire de Michael. Quand je travaillais sur The Way You Make Me Feel, Michael m’avait dit qu’il ne voulait pas danser dans la vidéo. Je l’ai accepté. J’en ai fait des cauchemars.
Au cours d’une journée de préparation du tournage, j’ai entendu de la musique qui venait de l’arrière du plateau de tournage. Michael, Vince et quelques danseurs étaient là et travaillaient sur une chorégraphie géniale. Tellement bien qu’il était impossible qu’il n’y ait pas de danse. Le morceau était vaguement basé sur quelques mouvements que les membres du gang faisaient sur le plateau et était ouvertement sexuel.
J’ai embauché quelques membres de gangs pour faire plus authentique. Le problème avec cette chorégraphie était qu’il n’y avait pas de place pour l’intégrer dans la vidéo prévue. Je les ai regardés pendant un moment, puis je suis retourné sur le plateau et j’ai discuté du problème avec Geoffrey Kirkland, le chef décorateur. Nous avons mis une bouche d’incendie et j’ai cassé une voiture avec un marteau (une excellente thérapie). Nous avions notre ‘lieu’. Le morceau chorégraphié à la fin de la vidéo était formidable et Michael l’a utilisé sur scène dans sa tournée Bad. L’interprétation de la danse de rue de Vince était brillante et s’enchaînait naturellement avec l’introduction de la chanson. Vince aurait du être le co-directeur de ce short film car il a eu une forte influence sur les mouvements de Michael. Michael lui faisait entièrement confiance.
La relation avec Frank DiLeo
Frank DiLeo était l’agent, le manager, le gestionnaire de Michael Jackson, il faisait tout. Il était brillant. Je l’ai rencontré lorsque je faisais une série de publicités Pepsi avec Michael liées à l’album Bad [The Chase]. Les gens de Pepsi avaient fait des storyboards ringards et notre première rencontre avec Michael ne s’était pas bien déroulée bien que l’agence ait essayé d’expliquer les choses.
Frank a découvert que nous étions tous les deux de Pittsburgh et il s’est créé un lien entre nous. Il m’a pris à part et m’a demandé si je pouvais l’aider car l’agence, pour une raison étrange, ne voulait pas dépenser d’argent pour de meilleurs idées. J’ai fait faire de très grandes maquettes et j’ai organisé une autre réunion. Michael a parcouru les planches et a demandé si nous pouvions réellement faire les choses indiquées dessus et je lui ai assuré que nous pouvions. De l’argent bien dépensé. Frank était sur le côté et m’a fait un clin d’œil. Nous sommes devenus amis depuis ce moment.
Michael a aimé ce que j’avais fait pour les publicités et Frank m’a demandé de faire le clip vidéo (Michael aimait les appeler « des courts métrages ») pour Man In The Mirror, et j’ai commencé à travailler sur quelques idées. Un peu plus tard, Frank m’a dit qu’il n’y n’avait pas besoin de vidéo pour cette chanson car le titre était déjà un gros succès sans vidéo et il m’a envoyé la démo de The Way You Make Me Feel. L’objectif était d’avoir plus de numéros un que n’importe quel autre album. La vision et la perception de Frank (et de Quincy Jones) étaient brillantes. L’idée de Frank était que I Just Can’t Stop Loving You serait le premier single et serait un hit instantanément puisque Michael n’avait pas sorti d’album depuis un certain nombre d’années. Bad serait un numéro un facile et Man In The Mirror aussi. Les autres titres auraient besoin d’un peu d’aide pour se positionner. J’étais contrarié et déçu après qu’il m’ait retiré Man In The Mirror car The Way You Make Me Feel n’était pas un morceau de musique aussi fort et j’ai eu du mal à l’appréhender. (…).Le titre semblait lisse et il n’y avait rien dans le morceau qui me donnait un indice pour une vidéo. Frank et Quincy m’ont dit quel était le but. Je ne me souviens pas qui l’a dit mais l’indice a été, « … l’objectif de la vidéo c’est qu’il y ait de la nana pour Michael! »
Résultat : un autre hit. Mais je ne sais pas si Michael a pu conclure.
Frank et moi sommes devenus ensuite de bons amis et nous avons travaillé sur une idée de film génial pour Michael. Mais après la tournée Bad, Michael et Frank se sont séparés. Plus tard, j’ai apporté l’idée à Sony mais ils ne voulaient pas dépenser l’argent que le film aurait demandé. Le dirigeant de Sony a mentionné un budget et je lui ai dit que Smooth Criminal avait coûté bien plus cher que cela.
Je n’ai jamais su la raison pour laquelle Michael et Frank s’étaient séparés, car Frank a disparu pendant un certain temps. Un long moment s’est écoulé et j’ai aidé Frank à traverser une mauvaise période. Il a finalement retrouvé Michael, et ironiquement c’était pour monter le film hommage après le décès de Michael.
Nous avons déjeuné ensemble pour nous remémorer un peu les moments avec Michael. Frank avait l’air bien, il était comme avant, mais lui aussi est décédé peu après.
Frank était l’un des personnages les plus dynamiques que j’ai jamais rencontrés et il était sympa, honnête et perspicace. Cette honnêteté était une chose rare dans le milieu. Si Michael et lui étaient restés ensemble, l’histoire de Michael aurait certainement changé et pour le mieux. Je pense souvent à Frank. C’était une grande époque.
Quincy Jones
Quincy Jones était une force avec Michael Jackson sur les vidéos que j’ai faites de l’album Bad. Il était calme, beau, éloquent et élégant. Michael, Frank (DiLeo) et Quincy étaient une version de la Trinité. Quincy savait tout de la musique et où elle devait aller. Je devais faire la vidéo de The Way You Make Me Feel et je ne savais pas trop comment prendre la chanson, où elle devait se dérouler et quel était le but. La chanson me semblait très douce, surtout par rapport à la vidéo Bad que Martin Scorsese avait faite. The Way You Make Me Feel me rappelait une chaude soirée d’été au coin d’un magasin du Kansas. C’était trop lisse. J’ai rencontré Quincy et Frank pour discuter de cette question et Quincy m’a dit carrément. « Le but de cette vidéo c’est que Michael se fasse une nana. »
Fin de l’histoire.
Un projet de film façon West Side Story
Après avoir filmé et monté The Way You Make Me Feel, l’idée de faire une version de West Side Story est venue. Je ne sais pas qui a eu l’idée, Michael, Frank ou moi, mais …
Cela sonnait comme une évidence car l’album Bad avait déjà des échos de West Side Story et de Roméo et Juliette Quand j’ai vu pour la première fois la célèbre vidéo de Bob Giraldi, Beat It, j’ai senti l’influence des Jets et des Sharks de la pièce. Michael avait déjà utilisé ces thèmes avec succès, donc beaucoup du travail préparatoire avait déjà été fait et l’idée que Michael devait retravailler les chansons était quelque chose de passionnant.
Bien que les gangs utilisés dans The Way You Make Me Feel venaient de Los Angeles et de Venice et avaient été efficaces, nous avons décidé que notre version West Side Story aurait lieu dans le Bronx, en hommage à l’œuvre originale.
Nous n’avons pas été jusqu’à discuter du titre, mais notre version n’allait pas être pas un morceau d’époque et la situation des gangs partout avait changé. La « partie ouest » de l’original n’existait plus, elle avait été réhabilitée, et le Bronx était plus approprié car c’était un quartier difficile.
Nous avions créé quinze minutes d’un film puissant en trois jours. Cela prouvait que nous pouvions faire le film entier en quelques semaines et sans avoir besoin de Michel pendant une longue période. Bien sûr, ce n’était que de la production, pas du temps nécessaire en studio pour créer et recréer la musique.
Mais ce qui était une évidence n’a finalement pas été une évidence.
Ca a été un refus catégorique. Les gardiens de la flamme de West Side Story n’étaient pas intéressés. Ils ne voulaient altérer le concept original en aucune façon, et particulièrement la chorégraphie de Jerome Robbins. L’excuse a été que la comédie musicale était constamment sous licence et rentable et qu’ils ne voulaient pas tuer la poule aux œufs d’or.
Chaque fois que je vois Beat It ou The Way You Make Me Feel, je pense à ce que ça aurait pu donner. Michael n’a jamais fait de film, même si nous avons travaillé sur The Thief of Bagdad pendant un certain temps. Cela n’aurait pas dû être le cas (pour des raisons étranges) et c’est triste.
Je suppose que West Side Story continue d’être joué dans un dîner-théâtre, mais ce n’est pas ce qui aurait du se passer
La carrière de Joe Pytka ne s’arrête bien sûr pas à son travail avec Michael Jackson. En témoigne son site web où il évoque ses nombreux projets cinématographiques et publicitaires et ses rencontres dans le milieu.
Source : pytka.com (traduction : onmjfootsteps.com)
3 Comments
anniva
Quel article formidable ! On apprend tellement de choses ! J’adore découvrir toutes ces anecdotes « behind the scene ». Nous plongeons dans l’essence même de la création des « short films » de Michael et également dans de petites histoires internes qui gravitaient autour de lui ! Merci c’est toujours un plaisir de te lire et de pouvoir enfin commenter
Rachelmj
Oui je vois ça, tant mieux pour toi … et pour nous Oui, je confirme, j’adore aussi ces anecdotes de travail …
♥ Jolanta ♥
Thank you, Rachel, I read the article with great pleasure and emotion.