The Greatest Night In Pop, documentaire sur les coulisses de We Are The World
Le 29 janvier 2024, dix jours après avoir été présenté en avant-première au Sundance Festival, Netflix met en ligne un documentaire qui revient sur les coulisses du titre We Are The World, interprété par le collectif USA For Africa, sorti en 1985, afin de récolter des fonds contre la famine en Ethiopie.
Annoncé au début du mois de janvier, sorti de nulle part, The Greatest Night in Pop promet des images d’archives inédites sur cet enregistrement historique qui a réuni à l’époque les plus grandes stars américaines de l’industrie musicale.
En novembre 2004, un dvd de cinquante-deux minutes intitulé We are the World – The Story Behind the Song s’intéressait déjà aux coulisses de cette chanson qui allait alors célébrer ses vingt ans. Ce documentaire filmé le jour de l’enregistrement et présenté par Jane Fonda proposait à l’époque de nombreuses images inédites.
Qu’allait donc pouvoir nous apporter de plus The Greatest Night in Pop ? C’est un peu dans cette expectative – et avec en tête, il faut bien le dire, la déception du documentaire Thriller 40 – mais tout de même avec beaucoup d’impatience et surtout la promesse d’un voyage dans les années 80, que j’ai regardé ce film, réalisé par Bao Nguyen, dès sa sortie.
Bon, alors disons le tout de suite, il y a au final peu d’images inédites. Quelques plans, certes, mais en tant que fan on n’en découvre pas énormément. L’intérêt et la puissance de ce documentaire résident essentiellement dans la qualité de ses intervenants, sa construction chronologique et son story-telling. Car oui, We Are The World, c’est l’histoire d’une grande chanson devenue un hymne à travers les décennies et dont le message résonne encore aujourd’hui.
Quarante ans après, The Greatest Night of Pop nous conte donc l’histoire de ce titre d’un bout à l’autre du projet, dans le Los Angeles dans années 80 (là, c’est l’amoureuse de cette ville qui parle !) de sa naissance à son accueil partout dans le monde. Des images qui donnent des frissons. Grâce aux souvenirs des stars qui étaient là ce 28 janvier 1985 et qui témoignent, on replonge dans la genèse de ce qui allait devenir le plus grand titre caritatif au monde et on vit avec eux la pression en studio, quasiment heure par heure, lors de cette nuit unique.
Lionel Richie, Bruce Springsteen, Cindy Lauper, Huey Lewis, Kenny Loggins, Smokey Robinson, des associées de Ken Kragen, ainsi que des producteurs et ingénieurs sons dont les fans de Michael connaissent bien les noms – Tom Bahler, Humberto Gatica et la voix du grand Quincy Jones (le grand absent de ce reportage) – sont de retour dans les studios A&M, là même où quatre décennies plus tôt a eu lieu la session d’enregistrement, pour nous livrer des anecdotes inédites et leurs ressentis, images à l’appui.
Si, comme moi, vous êtes assez vieux pour avoir vécu la sortie de We Are The World en mars 1985 (j’étais adolescente et je peux vous assurer que ce documentaire musical vous replongera dans votre jeunesse avec une sacrée dose de nostalgie), vous connaissez forcément l’histoire derrière la chanson – Harry Belafonte, l’initiateur du projet, les stars qui se retrouvent en studio après la cérémonie des American Music Awards pour juste une nuit, le « Check your ego at the door » laissé par Quincy Jones – mais durant une heure trente-sept, de nombreux moments forts nous en apprennent encore beaucoup sur cet enregistrement. En vrac, je pense au travail en amont de Tom Bahler pour associer les voix de chacun des artistes qui allait avoir l’opportunité de chanter une phrase en solo, à ce malheureux Bob Dylan qui a un mal fou à enregistrer sa partie, et qui aura besoin de l’aide de Stevie Wonder pour y arriver, Al Jarreau, ivre, qui doit être canalisé, la pauvre Sheila E. utilisée pour faire venir Prince qui ne se présentera jamais, Huey Lewis qui doute de lui, et bien sûr la voix cristalline de Michael au moment de sa partie solo : « Je réglais quelques éclairages, Michael Jackson écoutait la démo au casque et tout à coup il s’est mis à chanter. C’est la voix la plus extraordinaire qu’il m’ait été donnée d’entendre », déclare un des techniciens du studio.
Un passage dont on aurait voulu plus d’images ? Sans aucune hésitation celui où Lionel Richie retrouve Michael Jackson dans sa maison d’Encino pour travailler sur le titre qui n‘en est encore qu’à ses balbutiements. La séquence semble avoir été filmée mais on ne nous montre que des bribes. Un moment un peu étrange où l’on s’attend à réellement voir des images d’archives inédites mais il n’en sera rien.
Et puis comment ne pas verser sa petite larme, lorsque finalement on apprend que Diana Ross s’est mise à pleurer au petit jour, une fois tout le monde parti, car elle ne voulait pas que ce moment s’arrête ou lorsque Lionel Richie évoque, les larmes aux yeux, « sa maison vide », ce studio d’enregistrement où se tenait ceux qui ont participé et dont certains ne sont plus là aujourd’hui : « Il y a des années, mon père m’a dit : profites du moment où tu rentres chez toi parce qu’un jour tu ne pourras plus le faire. Je ne comprenais pas où il voulait en venir. Il a dit : la maison sera toujours là, mais les gens ne seront plus là. Ca s’est fait ici. La console est là mais Humberto n’est pas assis derrière. Michael était juste là (il désigne l’endroit), dans cette pièce. Bruce Springsteen a fait son solo dans ce coin, Cindy Lauper était de ce côté-là. C’était quelque chose. Je me sens un peu chez moi dans ce studio. »
Enfin, cet hommage final à ces dix artistes qui nous ont quittés, dont bien sûr Michael Jackson. Des mots simples affichés à l’écran, qui produisent toutefois leur effet, qui nous rappellent le temps qui passe, mais surtout pour ne pas oublier que ces grands noms qui nous manquent ont laissé leur empreinte dans un projet qui a fait date dans l’histoire de la musique.
Le documentaire joue avec nos émotions : la nostalgie bien sûr, la passion de ces stars qui mettent tout leur cœur au profit de l’Ethiopie affamée et qui nous entraînent avec eux dans ce studio, leurs doutes, leurs rires – des superstars qui se dévoilent humainement – le suspens de cet enregistrement contre la montre (même si on connait la fin, on se prend au jeu du « Y arriveront-ils ? »), les frissons de voir ce titre repris à l’unisson par des milliers de personnes et la satisfaction de Lionel Richie, tout sourire, qui lui-même n’en crois pas ses yeux.
« Ce film diffuse le sentiment de regarder par le trou de la serrure un des moments les plus iconiques de la musique. » (Le Parisien). C’est tellement vrai et c’est magnifique! Si vous ne l’avez pas encore vu, courrez voir The Greatest Night in Pop !
Petit extrait
Quelques jours après sa sortie, le documentaire s’est déjà hissé parmi les meilleures diffusions de Netflix et recueille des avis plus que positifs non seulement des fans mais aussi des médias. Bao NGyuen a réussit à faire plus fort que l’Estate de Michael Jackson !
Relire l’histoire de We Are The World ici et voir les documents d’époque ici, ici, ici (en anglais) et ici.
2 Comments
Dany
La magie de Michael opère comme toujours, intemporelle. Une mention au festival Sundance, qui essaie peut-être de faire oublier son attaque frontale contre Michael en 2019 avec la diffusion d’un pseudo-documentaire immonde. Merci Rachel !
Rachel
J’ai aussi pensé à cela, effectivement, concernant le festival Sundance 😉