Michael Jackson et ses photographes

Clichés inédits de Dick Zimmerman du photoshoot pour la pochette de l’album Thriller

Quelques jours avant la diffusion du documentaire Thriller 40  et  41 ans, quasiment jour pour jour, après la sortie de l’album qui a révolutionné la musique et est devenu l’album le plus vendu de tous les temps, on découvre encore des clichés de la session photos pour laquelle Michael Jackson a posé pour la pochette de Thriller.

Cinq photos inédites, des polaroïds pris par Dick Zimmerman en 1982 seront proposées aux enchères le 9 décembre 2023 par la maison Blackwell, à Clearwater, en Floride, accompagnées d’un certificat d’authenticité signé du photographe qui a immortalisé Michael Jackson dans son costume blanc. Parmi elles, deux clichés alternatifs du chanteur pris quelques minutes  avant la célèbre pose de Michael qui fera le tour du monde quelques mois plus tard sur l’album Thriller.

L’appareil photo de Dick Zimmerman, qui a servi ce jour-là pour shooter le chanteur sera également mis aux enchères. L’appareil avait aussi servi à prendre des photos de la collaboration entre Michael Jackson et Steven Spielberg lors du projet E.T. The Storybook ainsi que pour le mariage du chanteur avec Lisa Marie Presley.

En novembre 2017 déjà, Dick Zimmerman avait publié sur son site un cliché inédit dont il disait qu’il avait d’abord été envisagé pour la pochette de l’album avant d’être abandonné au profit de celui que l’on connait.

C’est le 22 juillet 1982 qu’a eu lieu ce photoshoot. Michael Jackson est aux Westlake Studios depuis le mois d’avril avec Quincy Jones et Bruce Swedien pour travailler sur l’album qui porte encore le nom de Starlight.

Dans une interview qu’il a donnée peu après la disparition de Michael Jackson, Dick Zimmerman, célèbre portraitiste de stars, surnommé the « Image Maker », est revenu sur le jour du shooting et comment il avait été choisi pour immortaliser celui qui allait devenir le King of Pop.

« De 1982 à 1994, j’ai eu le privilège unique à trois reprises de faire des photos de Michael. Là première fois c’était pour l’album Thriller, la seconde fois c’était pour sa narration de l’album E.T. pour Steven Spielberg. La troisième fois j’ai fait les portraits exclusifs de lui et de Lisa Marie pour leur mariage, qui ont été distribués dans le monde entier. Au cours de ces années, j’ai eu la chance d’avoir des conversations très personnelles et de le connaître à un niveau d’intimité qui m’a donné un aperçu de sa personnalité  qui m’a profondément impressionné.

Michael Jackson était un artiste brillant et créatif. Nous avons passé de nombreuses heures privées à créer et à converser au cours des années où j’ai travaillé avec lui. »

La première rencontre

« J’ai rencontré Michael Jackson pour la première fois dans un studio d’enregistrement sur Beverly Boulevard à Hollywood, il avait terminé de travailler sur les trois quarts de ce qui allait devenir l’album le plus vendu de l’histoire. CBS Records m’avait dit qu’il y avait aussi un autre photographe en lice sur ce projet.

Michael souhaitait rencontrer personnellement les deux candidats avant de décider avec qui il voulait  travailler sur la pochette de l’album. Je sais maintenant, après avoir travaillé pas mal de temps avec lui sur d’autres projets, qu’il avait besoin de quelqu’un qui très bon dans ce qu’il fait, qui ne soit pas égoïste, qui soit digne de confiance et créatif. Plus important encore, il avait besoin de travailler avec quelqu’un qui le traiterait avec délicatesse et considération, qui ne soit ni menaçant ni offensant.

Lorsqu’il a franchi lentement et prudemment les portes du studio où avait lieu notre réunion, ma première impression de Michael a été qu’il était plus grand et plus mince que ce à quoi je m’attendais. Sa poignée de main était très délicate, avec peu de pression, et j’ai fait attention à lui rendre la même chose.

Pendant que nous parlions, Michael me posait des questions de sa voix douce sur ce que j’aimais et ce que je n’aimais pas. À la façon dont il posait ses questions, je peux dire que je passais un test. C’est à ce moment-là que j’ai réalisé à quel point il était important pour Michael de travailler des personnes qui puissent le mettre à l’aise. Notre rencontre a duré environ quarante-cinq minutes et nous nous sommes quittés avec un au revoir cordial. »

 L’appel

« Trois jours plus tard, j’ai reçu un appel téléphonique de CBS Records m’informant que la première phase était terminée et que Michael voulait maintenant venir me voir dans mon studio et regarder la qualité de mes photos. L’entrée de mon studio avait une forte sonnerie, mais à la place, on a frappé très doucement à la porte. Plutôt que de laisser ma secrétaire répondre, je suis allé ouvrir moi-même. Je voulais que Michael sache que j’étais réel et accessible et je voulais également éviter tout ce qui aurait pu créer une situation inconfortable pour lui. Évidemment, j’ai réussi l’examen puisque j’ai reçu deux jours après la confirmation de CBS que Michael m’avait choisi et le shooting  de l’album a été programmé deux semaines plus tard.

J’ai facturé 4000 $ à CBS– ce qui était une belle somme en 1982 (et presque le prix le plus élevé pour une pochette d’album). Au cours des deux semaines qui ont suivi, j’ai eu des réunions avec les responsables créatifs de CBS et Freddie Demann, le manager de Michael à l’époque. Le but était de créer une direction visuelle pour l’album sur laquelle tout le monde serait d’accord. J’ai présenté diverses idées que je voulais mettre en œuvre et qui ont toutes été acceptées. »

Le jour du shooting

« Le jour du shooting est arrivé. J’avais embauché l’un des meilleurs stylistes de mode de Los Angeles pour rassembler un large choix de tenues, et nous avons commencé le difficile processus de sélection des vêtements pour la pochette son intérieur. Après environ une heure passée à parcourir la garde-robe, Michael n’avait rien trouvé qui l’emballait. J’ai commencé à paniquer. Ses yeux s’illuminèrent alors lorsqu’il remarqua le costume blanc que je portais. Il a dit : ‘C’est le look que j’aime, est-ce qu’il y a quelque chose comme ça ?’ Nous n’avions rien de ce genre. Le temps passait. Et je m’inquiétais de ne  pas avoir suffisamment de temps pour mettre en place mes idées pour la pochette. J’ai remarqué que nous avions à peu près la même taille et la même corpulence et je lui ai demandé s’il aimerait porter le mien. C’était exactement ce qu’il voulait. Heureusement pour la séance et le temps qui nous restait, le costume lui allait comme s’il avait été spécialement taillé pour lui.

Nous avions décidé avant la séance que Michael aurait un bébé tigre sur la photo, nous avions donc le choix parmi une sélection. Il a adoré un petit de six semaines mais il était réticent à l’idée de le laisser s’approcher trop près de son visage à cause d’éventuelles griffures. Tout au long de la séance, j’ai dû faire en sorte que Michael oublie cela et se concentre sur l’objectif.

Pendant les pauses, Michael se plaçait devant un grand miroir et s’entraînait à tourner sur lui-même. J’ai eu le privilège d’avoir un aperçu de ces légendaires vrilles qui nous sont désormais si familières. Il prenait vie devant ce miroir. C’était fascinant parce qu’il avait eu une attitude si timide et discrète tout au long de la séance photos, mais devant ce miroir, en dansant, il était électrique. C’est la première fois que je réalisais que j’étais témoin de quelque chose de très spécial. Pour le déjeuner, il a commandé un repas spécial provenant de son restaurant végétarien préféré. Quelques mois plus tard, Michael a embauché le chef de ce restaurant comme cuisinier personnel.

La séance photos a duré environ six heures avec trois décors différents. Il n’y a eu aucun problème particulier. J’ai été très impressionné par la diligence de Michael car il y avait quelqu’un de sa société de production qui utilisait un compteur pour compter chaque clic de l’appareil photo  afin de s’assurer qu’il verrait  chaque cliché pris. Cela témoigne avec élégance de son professionnalisme constant et minutieux. À la fin de la journée, nous nous sommes dit au revoir en convenant d’un rendez-vous quelques jours plus tard pour voir le résultat.

Quatre jours plus tard, les photos étaient prêtes et nous nous sommes retrouvés au studio d’enregistrement de Beverly Boulevard. Michael était en train de finir un des morceaux pour l’album, alors j’ai installé ma table lumineuse et j’ai étalé les diapositives pour qu’il puisse les voir toutes en même temps. »

​La pochette de l’album

« Michael est sorti du studio et s’est dirigé vers la zone de réception où étaient les diapositives. Il était de très bonne humeur. Il a les a toutes regardées et a été très excité et satisfait de ce qu’il voyait. Il a dit : ‘Il y en a tellement de réussies, comment puis-je prendre une décision ?’ Il m’a demandé d’attendre une minute, puis il est retourné en courant dans le studio. Après un moment, il est revenu avec Quincy Jones, qui produisait l’album et qui était visiblement très respecté par Michael. Quincy a jeté un œil aux diapositives et, avec un sourire confiant, et, sans aucune hésitation, en a montré une et a dit : ‘C’est ta couverture, Michael !’

 J’ai été totalement impressionné par cette décision, car c’est la première fois que je voyais quelqu’un prendre une décision aussi rapidement  et sélectionner une diapositive et, en plus, c’était un bon choix. Michael était extrêmement heureux. Quincy était heureux. CBS était content. J’étais aux anges, et à en juger par le fait qu’il s’agit toujours de l’album le plus vendu de l’histoire, je peux dire sans aucun doute que c’était le bon choix et que tout le monde était heureux. Ce cliché est devenu emblématique. Qui aurait cru qu’un clic de caméra, d’un 1/60ème de seconde, créerait l’image inoubliable qu’elle est devenue dans l’histoire. »

Six heures de photoshoot …. Il doit donc y avoir encore tellement d’autres clichés de cette séance.

Sources: artofdesignonline.com / Cette interview a été publiée en 2011 dans le livre Michael Jackson KING, de Richard Lecocq.

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